Emission
du |
12/08/08 |
Thème |
La cnsa |
Invités |
Gary Mathieu
Jean-Marie Binette |
Transcription
Bernard |
Je ne
sais pas si vous vous souvenez, la semaine dernière, lors de la première
émission après mon retour de vacances, j’esquissais une sorte de programme pour
le reste de l’année 2008 et j’avais énuméré quelques thèmes qui pourraient
être abordés. L’un de ces thèmes concernait les mesures à prendre face à ce
complexe de questions liées aux « émeutes de la faim ».
Nous
avions eu la proposition de la FONHDILAC, puis nous avons reçu deux membres
du Forum Agricole Goâvien, j’ai brièvement parlé du sommet de la FAO, qui
s’était tenu à Rome, nous avons reçu des membres du l’Association des Paysans
de Boucassin, et j’avais dit que nous reviendrons sur cette problématique.
Cet
après-midi nous avons un personnage clé d’abord du fait qu’il est ce qu’on
appelle en anglais mon « landlord », car c’est lui qui permet à
l’INARA de faire « la descente » dans l’immeuble où nous sommes
logés, mais surtout l’agronome Gary Mathieu est le coordonnateur de la CNSA
(Coordination Nationale de la Sécurité Alimentaire). Autrement dit, il est au centre de tout ce qui se fait dans
le domaine de la sécurité alimentaire, de la lutte contre la faim.
Il
est accompagné de quelqu’un que nous connaissons déjà ; Jean-Marie
Binette, agronome mais aussi juriste, était venu nous parler du droit
environnemental haïtien face aux avancées du droit international. Aujourd’hui
il nous vient avec un autre point juridique : le droit à l’alimentation.
Mais avant
de parler de la CNSA, Monsieur le coordonnateur, la sécurité alimentaire,
qu’est-ce que c’est ? |
Gary |
Selon
la FAO, on est en situation de sécurité alimentaire quand la population
trouve des aliments en quantité et en qualité pour satisfaire ses besoins. La
sécurité alimentaire est un concept qui repose sur quatre piliers :
1. la
disponibilité, ce qui suppose d’abord la production nationale, mais aussi les
importations commerciales et l’aide alimentaire ;
2. l’accessibilité,
ce qui suppose que le consommateur ait les moyens d’acheter les aliments,
référence au pouvir d’achat, donc aux revenus, d’où la relation entre
sécurité alimentaire et pauvreté ;
3. l’aspect
nutritionnel ;
4. la
stabilité.
Mais
la disponibilité est liée à une série de facteurs. Récemment le responsable
du PAM (Programme Alimentaire Mondial) me disait qu’il avait $ 400 millions
pour acheter du riz ; mais ce riz venait d’Asie, et il fallait $ 7
millions rien que pour le transport. |
Binette |
Quand
on considère l’aspect nutritionnel, il faut tenir compte de deux
aspects :
1. l’aliment
est sain, il n’est pas porteur de germes de maladie ;
2. le
consommateur est en mesure de tirer profit de l’aliment. |
Gary |
Il y
a une précision à porter. Le problème de l’insécurité alimentaire ne se pose
pas partout de la même manière. Dans les pays de la Caraïbe, ils n’ont pas de
problème de disponibilité ; leur problème, c’est l’obésité. L’insécurité
alimentaire pour eux c’est l’aspect nutritionnel. Même chose en
République Dominicaine. |
Binette |
Quand
on parle de disponibilité, il faut tenir compte de la culture nationale. Si
tu prends un musulman et que tu lui présente un plat de griot de porc, il y a
disponibilité … |
Bernard |
…
mais il ne va pas manger. |
Binette |
Culturellement
il faut qu’il y ait l’acceptation de l’aliment disponible. En Haïti, on
constate un changement dans les habitudes alimentaires. Et quand nous parlons
de droit à l’alimentation, nous parlons de ces agressions contre la culture. |
Bernard |
Quand
tu as donné l’exemple du PAM, j’ai pensé à cette ONG qui avait reçu une offre
d’équipements gratis, mais il fallait payer le transport.
Nous
essayons de faire une émission décontractée, aussi nous arrive-t-il de
taquiner nos invités : Monsieur le coordonnateur, tu me parles de
sécurité alimentaire, mais j’ai des amis qui ne veulent pas entendre parler
de sécurité alimentaire, pour eux, l’objectif c’est la souveraineté
alimentaire. Comment réagis-tu à cela ? |
Gary |
La
sécurité alimentaire, comme nous l’avons décrite, c’est la grande panacée. La
souveraineté alimentaire est le fait de pays qui ont développé la capacité de
produire leur propre alimentation.
Prenons
les pays du Golfe Persique. Ils ne peuvent produire leur alimentation, mais
ils n’ont pas d’insécurité alimentaire, ils ont les moyens d’importer. Pour
nous, nous cherchons à augmenter la disponibilité par la relance de la
production nationale. Pour arriver à la souveraineté, il faudrait augmenter la production nationale
pour éliminer les importations. Mais
c’est un long cheminement, et on n’arrive jamais à la souveraineté
totale, car il y a des aliments qu’on ne peut produire.
Il y
a eu les changements dans les habitudes de consommation dont parlait
l’agronome Binette. Cela a commencé dans les années 80, quand on s’est mis à
consommer du riz en grande quantité, quand on s’est mis à importer des abats
de volaille, et toute la libéralisation du commerce, dont nous payons
aujourd’hui les conséquences. |
Bernard |
Je ne
me souviens plus où j’ai entendu le slogan : mange ce tu produis,
produis ce que tu manges.
La souveraineté
alimentaire est surtout une attitude : ne venez pas modifier mes
habitudes alimentaires, ne touchez pas à ma culture.
Il y
a des choses choquantes ; à Miami, les haïtiens vous invitent et vous
servent de la bouillie de blé, que je trouve abominable, mais surtout qui
nous a été imposée par l’aide alimentaire |
Binette |
La
souveraineté alimentaire ne veut pas dire qu’on ferme le pays aux
importations. C’est un droit qu’a un peuple de choisir quel type d’aliments
il veut consommer, quel type d’agriculture il choisit. A partir de là, on
peut établir un système de protection – bien que le protectionisme ne soit
plus à la mode – de la production agricole. On ne rejette pas le commerce des
aliments, mais on ne rentre pas dans les grands principes du commerce
international – OMC (Organisation Mondiale du Commerce) – pour éviter de
subir le dumping des gros producteurs. |
Gary |
Mais
il faut un état fort. |
Bernard |
C’est
la fameuse volonté politique. |
Binette |
Et il
faut que l’Etat mette en place les balises nécessaires, les instruments
légaux, devant permettre à la production nationale de s’épanouir. |
Bernard |
Tu as
ouvert la voie à toute une série de discussions ; je te signale que le
protectionisme n’est pas si passé de mode que cela, vois les subventions à la
production du riz aux USA. |
Binette |
Il
n’y a plus de listes restrictives, il n’y a plus de contingentement, il n’y a
plus de barrières tarifaires, mais il y a d’autres barrières, sanitaires et
autres. |
Gary |
Je
peux donner l’exemple du Japon qui met une taxe de 80 % sur le riz importé,
alors que chez nous elle est de 3 %, et dans la région caraïbe elle tourne
autour de 30-35 %. |
Bernard |
Le
Japon a-t-il la possibilité de produire assez de riz pour nourrir son énorme
population sur sa petite langue de terre ? |
Gary |
Le
peu qu’ils produisent, ils le protègent. |
Bernard |
Nous
avons plus ou moins défini la sécurité
et la souveraineté alimentaire et cela nous a mené à toute une
discussion … |
Binette |
… on
est parti pour plusieurs jours. |
Bernard |
Je me
souviens de l’époque héroïque où nous menions la bataille contre le PPPADEP
(Projet d’Eradication de la Peste Porcine Africaine et de Développement de
l’Elevage Porcin) ; certains ont affirmé qu’il était faux que les
cochons étaient malades, et que le projet était juste un moyen pour faire
entrer de la viande de cochon et des abats de volailles dans le pays. |
Binette
|
Ça
c’est aussi un gros débat. |
Bernard |
Mais
je voudrais aborder un autre point. D’après ce que je sais, bien avant la
crise qui devait conduire aux « émeutes de la faim », la CNSA avait
envoyé des signaux d’avertissement ; est-ce que je me trompe ? |
Gary |
Non,
c’est exact. Depuis janvier 2008, nous avions fait une analyse de la
situation alimentaire.
Jusqu’à
la fin de l’année 2007, on avait eu des cyclones qui avaient affecté les
zones de produc-tion, et surtout, nous avions perdu la campagne d’automne.
Nous avions donc fini l’année avec un gros déficit de production et il n’y
avait eu aucune intervention du gouvernement ou de l’Etat pour atténuer les
effets des catastrophes ; canaux d’irrigation pas curés, pas de
distribution de semences, pas de programme d’intrants qui permettraient aux
agriculteurs de planter davantage. Et puis il y a eu la combinaison d’autres
facteurs que nous ne contrôlons pas : hausse du prix du pétrole, hausse
du prix des aliments à l’échelle internationale.
La
CNSA a combiné tous ces facteurs et, dans la publication de janvier 2008,
nous avons lancé un signal. Malheureusement Haïti est un pays où on n’aime
pas lire, ou alors on ne lit que les informations à sensation. C’est donc
passé inaperçu.
Nous
avons renouvelé le signal en mars ; nous avons sorti une analyse
prospective et des cartes, indiquant ce qui pourrait arriver en avril-mai.
Nous avions un scénario pessimiste, et c’est malheureusement lui qui s’est
réalisé.
Nous
avons donc joué notre rôle d’informer le grand public, mais surtout les
décideurs ; mais les mesures adéquates n’ont pas été prises.
L’autre
mission de la CNSA est la coordination des interventions. |
Bernard |
Je
voudrais reprendre en tenant compte des définitions données au début.
La
situation était que la disponibilité était réduite, parce que le production
était réduite, dans le même temps que l’accessibilité était réduite du fait
de la montée des prix sur le marché interna-tional. |
Gary |
Nous
avions une insécurité structurelle qui s’est aggravée suite à des causes
conjoncturelles. |
Bernard |
Maintenant
qu’est-ce qui se passe ?
Il y
a eu une réunion en Amérique Centrale ; je crois que le Président Préval
y a participé ; puis il y a eu le sommet de la FAO à Rome. |
Gary |
L’agronome
Binette y a accompagné le ministre Séverin |
Bernard |
Puis
il y a eu Madrid |
Gary |
Et on
prépare un après-Madrid. |
Binette |
Il y
a eu aussi une réunion au Nicaragua, puis au Honduras. |
Gary |
Non,
le Honduras c’était avant-hier, c’était Pétro-Caribe. |
Binette |
Le 2
juin, en préparation au sommet de Rome, il y a eu une réunion sur Haïti,
organisée par le ministre des affaires étrangères du Brésil, Celso Amaury |
Gary |
Ce
qui est arrivé en Haïti a beaucoup frappé l’opinion internationale. Beaucoup
de pays ont connu des émeutes de la faim, mais Haïti est le seul pays où
elles ont fait tomber un gouverne-ment. |
Appel |
La
sécurité alimentaire c’est bien, mais quand arriverons-nous à la souveraineté
alimentaire ? |
Gary |
Nous
ne sommes pas sur une mauvaise voie, dans la mesure où, après le coup de
fouet des évènements du 12 avril, tout le monde se rend compte, tant au
niveau national qu’au niveau international, qu’il n’y a pas d’autre solution
que de relancer la production nationale.
C’est
déjà un pas vers la souveraineté alimentaire. Et le document qui a été
présenté à Madrid mentionne clairement la souveraineté alimentaire. La 1ère
Ministre ratifiée a mentionné que nous avons perdu notre souveraineté sur
deux points … |
Bernard |
…
elle avait cité deux points, tous deux ayant à voir avec la sécurité :
∙
la sécurité alimentaire, et
∙
la sécurité tout court. |
Gary |
Il y
a donc des efforts qui se font au niveau gouvernemental et il y a le plan du
MARNDR qui est assez bien structuré. On est donc sur la route qui doit mener
à la souveraineté alimentaire, mais l’auditeur doit comprendre que ce n’est
pas pour demain, ni même à l’horizon 5 ans. |
Appel |
Quel
mécanisme y a-t-il au MARNDR pour répondre aux problèmes ? par exemple
au dumping du riz qui a commencé sous Henry Namphy ? |
Bernard |
Gay,
c’est pour toi. |
Gary |
Même
si je suis coordonnateur de la CNSA, qui est sous le tutelle du MARNDR, je ne
parle pas pour le MARNDR. |
Binette |
Le
ministère a préparé, avec l’appui de la FAO, un document de politique
agricole d’Etat qui vise le long terme. Cependant il ne faut pas voir
seulement le ministère, mais tout le secteur. Et il faut aussi faire appel à
ceux qui font l’arbitrage budgétaire, les parlementaires, pour qu’ils donnent
les moyens nécessaires. |
Bernard |
L’agronome
Binette a élargi la perspective, mais on peut aller encore plus loin. Pour
préparer cette émission, j’ai réuni une documentation qui révèle que ce n’est
pas seulement Haïti qui a des décisions à prendre, c’est au niveau mondial.
En Haïti, nous avons toujours cette hésitation entre agriculture vivrière et
agriculture pour l’exportation, qu’on a tendance à favoriser, mais ce n’est
pas le seul cas d’Haïti.
Toutes
les grandes institutions financières ont encouragé l’agriculture d’exportation,
l’agriculture pour l’agro-industrie, et maintenant, quand la catastrophe est
arrivée, on se dit qu’il faudrait faire, comme le disait le Monde
Diplomatique, une révision déchirante, et on se remet à parler
d’agriculture vivrière.
Je
pense que, comme d’habitude, nous allons voguer sur la vague d’une autre
forme de mondialisation, et on aura peut-être une nouvelle politique agricole
plus orientée vers l’agriculture vivrière, qui fournit des aliments à la
partie de la population qui a le plus faible pouvoir d’achat.
Cela
fait longtemps que je me bats pour cela, mais personne ne m’entend ; de
toute façon, je ne suis pas agronome, donc je n’ai rie à dire. En tout cas,
grâce à quelques centaines de milliers de dollars perdus dans les vitrines
brisées de Delmas, on aura peut-être une politique agricole plus
intelligente. |
Appel |
Je
veux aller plus loin que le choix d’une politique agricole ; pour faire
un choix, il faut une volonté ; cette volonté existe-t-elle ?
On
parle depuis longtemps de relance de la production nationale ; mais que
fait-on ?
Au
départ, il y a un problème : la production agricole est importante, mais
il n’y a pas qu’elle. De plus, on n’a pas les moyens nécessaires ;
existe-t-il une banque pour financer le développe-ment ? |
Gary |
Dans
le programme présenté à Madrid, et
qui est articulé autour de la sécurité alimentaire et le développement rural,
on privilégie l’agriculture vivrière. C’est un programme assez coordonné, et
pour une fois, les bailleurs de fonds acceptent que se soit le gouvernement
qui coordonne les dépenses. Cela se présente sous forme d’appui budgétaire.
On
verra ce qui se décidera lors le la conférence invitée par la France et le
Canada et qui se tiendra en Haïti en octobre. |
Bernard |
Cette
conférence d’octobre est-elle la suite de Madrid ? |
Gary |
Oui,
Madrid ne devait pas traiter des propositions de financement ; on s’en
tenait au cadre stratégique. En Haïti, on viendra avec des propositions de
projets et on parlera de financement. |
Bernard |
Aura-t-on
un gouvernement d’ici là ? |
Gary |
C’est
une condition. |
Appel |
Il y
a un autre problème. Si le pays donateur se trouve dans une conjoncture
inattendue qui l’empêche de faire les décaissements prévus ? |
Gary |
C’est
le problème de la stabilité, à tous les niveaux. |
Appel |
Et il
y a le problème des carburants alternatifs. Si on imagine d’utiliser la
production locale pour faire des bio-carburants ? |
Bernard |
Je ne
sais pas ce qui est dans la tête des gens de Damien, mais je peux te
rassurer, car il y a la possibilité de produire du bio-diesel sans
concurrencer la production alimentaire. |
Binette |
L’auditeur
a dit une chose importante : quand on parle de relance de la production
nationale, tout le monde entend production agricole, mais il n’y a pas que
cela ; il y a des tas d’autres productions à relancer : l’artisanat
… |
Appel |
Tu te
souviens des cordonniers qui étaient en face de l’Hôpital Général ? tu
te souviens de la Beurrerie du Sud ? |
Binette |
Il y
a un point où je ne suis pas d’accord ; le rôle de l’Etat n’est pas de
créer des industries pour les passer ensuite au secteur privé ; le rôle
de l’Etat est de créer les conditions pour que le secteur privé puisse
investir. |
Bernard |
Binette
a parlé de demander de compte, mais nous avons une mauvaise habitude de ne
demander des comptes qu’à l’exécutif, alors qu’on devrait en demander aussi à
nos mandataires, les parlementaires.
Je me
souviens, à l’époque du coup d’Etat, il y avait un groupe de leaders paysans
qui avaient dû se mettre à couvert ; nous nous réunissions de temps en
temps, et un jour l’un d’eux a demandé s’il n’y avait aucun moyen de prendre
des sanctions contre un parlementaire qui aurait pris des positions
contraires à celles de ses mandants. Et il citait le cas d’un député du
Centre qui avait appuyé le coup d’Etat alors qu’il avait été élu sur une
liste Lavalas. |
Appel |
C’est
un fait que les parlementaires ne font pas grand’chose ; la plupart des
projets de loi viennent du gouvernement. |
Bernard |
C’est
plus grave ; je ne sais plus si c’est Binette ou Jean André Victor qui
m’a dit que les meilleures lois de ce pays sont, au départ, des décrets pris
en période de vacance parlementairr. |
Binette |
C’est
moi qui te l’ai dit. |
Bernard |
Nous
avons commencé en retard, nous aurions encore beaucoup de choses à dire, et
nous n’avons pas eu le temps d’entendre Binette sur le sujet du droit à
l’alimentation, nous allons donc devoir nous rencontrer à nouveau, surtout si
la réunion d’octobre a lieu.
Mais
en attendant, très rapidement, quel est dans dans tout ce dont nous avons
parlé le rôle de la CNSA ? |
Gary |
Rôle
d’information |
Binette |
Je
voudrais dire qu’il y a une méconnaissance de la CNSA, et tu n’as jamais
demandé à Gary ce qu’elle était, où elle était rattachée. |
Bernard |
C’est
un fait que nous sommes partis sur la sécurité alimentaire et avons oublié la
CNSA. |
Gary |
La
CNSA a été créée en 1996. Cette année là, au mois de novembre, la FAO avait
organisé à Rome une conférence sur la faim dans le monde. Haïti était
représentée par le président Préval lui même. On avait demandé à chaque pays
de prendre des mesures en vue de lutter contre la faim. C’est ainsi que la
CNSA a été créée.
Elle
a à sa tête un Conseil Interministériel pour la Sécurité Alimentaire (CISA)
composé de cinq ministres : Agriculture, Plan, Finances, Commerce,
Santé.
Elle
a deux missions :
∙
suivi de la sécurité alimentaire,
∙
coordination des interventions.
Pour
le suivi, nous avons identifié une série d’indicateurs :
∙
pluviométrie,
∙
prix du marché,
∙
données macro-économiques.
Nous
les collectons chaque mois, nous les traitons, et nous sortons une publication
mensuelle. Chaque trois mois, nous sortons un bulletin conjoncturel et chaque
deux ans, nous sortons un bilan. Nous envoyons ces publications à environ 700
destinataires, et tout cela est accessible sur notre site internet.
Nous
ne vérifions pas quelle utilisation est faite des informations que nous
publions.
Pour
la coordination des interventions, nous ne faisons pas grand’chose. C’est
assez difficile, les acteurs sont des agences internationales, des ONG, des
acteurs de la société civile, et dès qu’on parle de coordination, on crée des
susceptibilités. Nous organisons des rencontres de concertation et nous
collectons des informations que nous restituons au public.
Nous
avons une faiblesse structurelle : la CNSA existe depuis 13 ans, mais
aucune loi n’est venue légaliser la structure, de sorte que nous ne pouvons
figurer au budget de la République.
Jacques
Edouard Alexis avait demandé un appui technique à la CNSA ; il avait
préparé un plan d’action contre la vie chère dont le budget s’élevait à S 4
milliards ; il n’a reçu que $ 400 millions.
Actuellement
nous avons réuni tous les acteurs et préparé un plan de réponse pour la
période avril-sptembre. Le budget s’élève à $ 135 millions. Il repose sur
trois piliers :
∙
création d’emplois à haute intensité de
main-d’œuvre (HIMO)
∙
aide alimentaire directe
∙
relance de la production.
$ 72 millions ont été décaissés, mais ce sont des
agences des Nations Unies qui ont reçu les fonds. |
Bernard |
Je
lisais un papier au sujet de ce plan et il était dit qu’un des problèmes
était l’identification des projets HIMO ; mais il y avait eu le PAS
(Programme d’Apaisement Social), ne pourrait-on pas reprendre les projets qui
y avaient été retenus ? |
Gary |
C’est
ce qu’on a fait. Mais personne ne sait, au gouvernement, combien d’argent a
été décaissé et qui l’a reçu.
Pour
remettre les choses à plat, le gouvernement a préparé ce programme qui a été
présenté à Madrid |
Bernard |
Puis-je
dire que grâce aux « émeutes de la faim » la CNSA a été en mesure
de remplir sa fonction de coordination ? |
Gary |
Oui,
c’est malheureusement vrai ; et on dit que cette crise a été une
opportunité pour de petits pays de relancer leur production agricole.
Notre
vision de la CNSA dans cinq ans est que nous devons avoir des relations
étroites avec une institution comme l’UCAONG (Unité de Coordination des
Organisations Non-Gouvernementales), et le bilan que nous sortons chaque deux
ans ne donnera pas seulement un état de la sécurité alimentaire, mais aussi
un bilan des réalisations. |
Binette |
Il y
a des pays ou la sécurité alimentaire est au niveau d’un secrétariat d’Etat. |
Bernard |
Il
est sept heures, nous allons devoir nous arrêter, mais nous reviendrons à la
CNSA … |
Binette |
… et
nous devons parler du droit à l’alimentation. |